Népotisme et insularité

Titre un peu provocateur, mais pas loin de la vérité. D’abord, le contexte. Les DOMs, et TOMs, sont souvent le théatre d’affaires politico-économico-judiciaires à tendance familiale. Regardez Lucette Michaux-Chevry en Guadeloupe, Pierre Vergès à la Réunion, Gaston Flosse en Polynésie… la liste est tellement longue, que je ne peux être exhaustif. Mais les mêmes reproches sont fait à Monaco, en Wallonie, au Québec… Quel est le point commun? L’insularité. Chacun de ces territoires existe dans une forme d’insularité. Soit géographique, soit politique.

Alors? Eh bien, la gestion d’une collectivité locale, ou d’une entité administrative par des élus, doit s’appuyer sur les fonctionnaires en place. Ce sont les rouages naturels de transmission des décisions politiques de gestion, prises par les élus. Et bien sûr, tout élu souhaite pouvoir être sûr que les décisions sont bien envoyées et transmises aux bonnes personnes, aux bons techniciens, pour pouvoir être appliquées. La première mission d’un nouvel élu est donc d’identifier ces courroies de transmissions. Puis de mettre en place une structure hiérarchique de transfert. Dans une petite commune, le maire, ou ses adjoints, peuvent adresser directement chaque cadre, pour obtenir les résultats souhaités. Dans un grand département (800.000 habitants), une région, ou un état, c’est plus difficile. On s’appuie alors sur un appareil politique, ou les compétences sont identifiées de longue date. Sous réserve que cet appareil existe! Par exemple, en France, quand un président de région a besoin de compétences, il appelle son parti, puis dans le réservoir de savoirs disponibles, et sous réserve qu’il ne soit pas perdu dans une province obscure (Creuse…), les candidats ne manquent pas, formés (énarques, X, Ponts…), fidèles (souvent encartés), compétents (fonctionnaires en disponibilité). On est loin de ce tableau idéal, dès que l’on quitte le territoire métropolitain. Ces cadres hors-pairs, conscients de leur valeur, traînent toujours à proximité des cercles de pouvoirs, et sont pléthore en Île de France, ou parfois présents en région près d’un ténor de la politique (Bordeaux…).

île

Que faire quand on est loin de tout, de tous, et que l’on doit être sûr que les décisions prises seront bien relayées? Quelles courroies de transmissions mettre en place pour une transmission favorable vers les cadres exécutifs? Qui choisir, de confiance, pour organiser une garde rapprochée d’exécutants fiables? C’est là que le népotisme intervient. En effet, qui connait-on mieux que les membres de sa famille? Qui a le plus à perdre en cas d’éviction que les proches de l’élu? Ainsi, le phénomène d’insularité engendre mécaniquement du népotisme. Et les opposants politiques, sociaux ou économiques ne devraient même pas s’en plaindre, car une fois au pouvoir, le même dilemne se posera à eux. A qui puis-je faire confiance? Vaut-il mieux mettre à la direction de telle structure mon neveu incompétent mais obéïssant, ou un brillant individu, qui risque de jouer individuel, quitte à me mettre en difficulté? Le coeur de l’élu doit donc constamment balancer entre « certitude filiale » et « risque concurrent ». Bien que les deux ne soient pas forcément opposés. Le titre de ce billet aurait pu être « Insularité, donc népotisme ».

famille royale

Et je n’entre pas dans le débat de la compétence de certaines catégories de hauts fonctionnaires, qui sont dans leurs corps respectifs, non par choix, mais par second choix, car pas assez performants pour avoir décidé de leur destination au sortir de leurs études, et qui doivent se satisfaire d’une affectation de seconde zone. Là, c’est tout l’état qui en souffre. Ce sera pour un autre billet

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